CentraleSupélec (CS) : Clément, pouvez-vous resituer votre parcours académique en quelques lignes ? 

Clément Nicolle (CN) : J'ai effectué l'an passé ma troisième année à CentraleSupélec, en option Mathématiques appliquées, majeure Data science. En parallèle, je suivais le master Mathématiques, Vision, Apprentissage à l'ENS Cachan. Je termine en ce moment mon stage de fin d'études chez Dreem , une jeune start-up spécialisée dans les neurotechnologies et plus particulièrement le sommeil. Je n'attends plus que ma soutenance pour valider les diplômes !

CS : Pourquoi avoir choisi le parcours data science de CentraleSupélec ? Qu'est-ce qui vous a attiré, motivé à le suivre ?

CN : J'ai eu l'opportunité de découvrir en quoi consiste concrètement ce que l'on regroupe sous le terme de « data science » lors de mon deuxième stage de césure, en 2014. Les expressions « big data », « machine learning » fleurissaient dans les médias, perçues comme de nouvelles techniques magiques pour améliorer le quotidien et prévoir l'avenir. L'aveuglement passé, on découvre qu'il n'y a rien de révolutionnaire. Il s'agit avant tout de méthodes statistiques et algorithmiques innovantes pour analyser les données qui restaient stockées sur les ordinateurs depuis des décennies, faute de puissance de calcul suffisante. Ce qui reste extrêmement intéressant !

J'ai été attiré d'abord par cet aspect novateur. D'un point de vue théorique, les algorithmes de machine learning sont relativement récents et font l'objet de nombreux travaux de recherche. Dans une perspective professionnelle, on voit affluer les demandes en « data scientist » de la part des entreprises, ce qui prouve que des besoins existent.

J'aime le fait que ce soit des mathématiques utiles aux personnes. Ce qui me motive, surtout, sont les applications à la santé, ou aux milieux du voyage, de la culture. Les nombreuses utilisations marketing ne m'ont jamais intéressé. J'ai besoin de savoir que mon travail va dans le sens de mes convictions pour rester enthousiaste.                     

CS : Quelles ont été vos premiers jobs/stages en tant que data scientist ?

CN : Ma première expérience en tant que data scientist a eu lieu lors de ma deuxième partie de césure à Evaneos, une start-up géniale qui met en relation voyageurs et agents locaux. J'étais bien loin, à l'époque, d'avoir à ma disposition tous les outils acquis au cours de ma troisième année à CentraleSupélec. J'ai tout de même pu développer, par exemple, un moteur de recommandation de voyage.

J'ai par la suite effectué le séminaire de recherche de l'option Maths App chez Dreem, qui conçoit un bandeau connecté pour améliorer la qualité du sommeil. J'ai notamment travaillé sur la classification automatique des états de sommeil. J'y termine en ce moment mon stage de fin d'études.

CS : Qu'avez-vous appris de ces expériences ? Sont-elles conformes à vos attentes ? Etes-vous toujours intéressé par la data science ? Avez-vous découvert de nouveaux aspects, nouvelles activités de la data science ?       

CN : Ces expériences m'ont d'abord permis d'effectuer le saut de l'idéal au réel, de la bulle de l'enseignement à la sphère du travail. Ici, les données ne tombent pas du ciel ou de la Dropbox d'un professeur. En fait, la plupart de mon temps est consacré à la compréhension, l'extraction, au nettoyage des données et de l'information qu'elles contiennent. Ce traitement initial est primordial pour obtenir de bons résultats en fin de compte, et nécessite une bonne maîtrise de l'environnement d'où les données ont été issues.

Le Parcours Data sciences, jointe au master MVA de l'ENS Cachan, donne un vaste aperçu de ce qui se fait en machine learning. Il est toutefois toujours intéressant d'explorer des pistes imaginées ou dénichées dans des articles. Les discussions à ce propos sont riches, avec mes collègues ou d'autres start-ups.

Plus qu'en data science en soi, c'est dans le domaine où je l'applique, les neurosciences, que je fais le plus de découvertes. En ce sens, la data science peut constituer une manière transversale et utile d'explorer d'autres horizons.

CS : Que projetez-vous à la sortie des écoles au sein desquelles vous êtes encore inscrits ? Quel type de job ? Quel type d'entreprise ?

CN : Je vais continuer de travailler chez Dreem à mi-temps. En parallèle, je suis inscrit en licence de philosophie à l'université de Nanterre. C'est un domaine qui me passionne depuis longtemps, dont je me suis un peu éloigné à CentraleSupélec, et je suis heureux d'avoir enfin l'occasion de m'y consacrer à nouveau. Le lien originel entre les mathématiques et la philosophie s'est éraillé avec la progression accrue des connaissances, mais il reste étroit à mon sens. Il me plairait particulièrement d'étudier les grandes théories de pensée d'autrefois à l'aune de ce que l'on sait aujourd'hui en neurosciences.